Watchmen : comparaison Comics / Bande-Annonce

Inutile de vous préciser que depuis quelques heures, le débat qui égaye notre joyeuse rédaction tourne fatalement autour de la bande-annonce du nouveau film de Zack Snyder, Watchmen, l’adaptation du monumental comics d’Alan Moore et Dave Gibbons (voir notre article ici). D’un côté il y a ceux qui suivraient le père Snyder jusque dans les sombres vallées du Mordor et qui ont failli écraser une larme en découvrant ses premières images (votre serviteur), et de l’autre les fines bouches ingrates qui avaient déjà hâtivement jugé 300 sur son esthétique new-age qui n’ont pas eu peur de sortir des mots comme « kitch » ou « ringard » pour décrire cet alléchant trailer. ("raciste" et "homophobe" aussi, comme le dit Alan Moore, nd Kevin Prin)

Pour autant, il y a une chose sur laquelle tout le monde est tombé d’accord : cette retranscription sur grand écran semble au premier coup d’œil ultra fidèle au matériel de base. Ni une, ni deux (ni trois ni quatre d’ailleurs), il n’en fallait pas moins pour justifier d’un petit comparatif trailer/comics histoire de déterminer avec exactitude les libertés prises par réalisateur de l’Armée des morts pour cette adaptation tant attendue. Attention, si vous n’avez pas lu le comics, ce dossier contient peut-être quelques petits spoilers !

La Bande-annonce est disponible à cette adresse.

Tout commence avec quelques plans d’une séquence mythique de la BD : l’irradiation de Jon Osterman dans la chambre d’essai du laboratoire du professeur Glass. En Août 1959, Osterman (Billy Cudrup) se retrouve enfermé dans la chambre, puis bombardé par des canons à particules... il deviendra alors Docteur Manhattan, le héros que les Etats-Unis attendaient. Les plans symboliques de ce quatrième chapitre (l’irradiation et la première apparition de Doc dans la cafétéria du laboratoire) sont repris quasiment à l’identique dans cette bande annonce, de manière légèrement moins trash pour le premier cependant. On pourra également voir un peu après dans le trailer un plan tiré d’une scène torride dans le chapitre 3 entre Miss Jupiter et Doc Manhattan. Y aura-t-il du sexe dans le film ?

Autre détail lié au Doc Manhattan : les catch-lines sur fond de rouages en 3D. En effet, le père d’Osterman étant horloger (« L’horloger » étant le titre du chapitre consacré à Manhattan), ce dernier se voyait déjà suivre les traces de son père avant que celui-ci ne le pousse vers des études en physique nucléaire. Ces rouages en 3D évoquent donc directement quelques planches du comics montrant les composants d'une montre à gousset, reprises à plusieurs reprises dans les premières pages du chapitre.

On enchaine ensuite un joli petit money-shot du vaisseau du Hibou sortant de l’eau, comme il le fait assez tard dans le comics (chapitre 10, soit quasiment à la fin). Bonne nouvelle : le design de l’appareil a été respecté au détail près par Snyder et son équipe déco !

Arrive ensuite la présentation du personnage de Silk Spectre (Le Spectre Soyeux en vf) aka Miss Jupiter aka Laurie Juspeczyk (Malin Akerman). Le look est encore une fois respecté même si, comme on pourra le voir un peu plus tard avec le Hibou, la texture du costume de Laurie semble être passé du simple tissu au cuir flashy. Tentative de modernisation de la part de Snyder ? A l’époque, un choix similaire avait été fait par Brian Singer avec les costumes des X-Men (on pense en particulier à celui de Wolverine) ce qui avait passablement énervé une poignée de fans, alors que le résultat à l’écran se révélait plutôt convaincant. Par contre si le choix d’Akerman (vu récemment dans 27 Robes), normalement blonde dans la vie de tous les jours, avait fait sauter au plafond les afficionados du comics il y a quelques mois, ses trois plans doivent aujourd’hui les calmer un peu. Elle EST Miss Jupiter ! On suppose que le plan où on la voit traverser un plafond pour atterrir dans un couloir en flamme (qui a dit Barton Fink ?) provient de la scène du sauvetage dans l’immeuble en feu du chapitre 7. En revanche le plan où on la voit descendre des marches ne se trouve nulle part dans la BD...

Autre séquence importante du livre : la libération de prison de Rorschach du chapitre 8. Un plan furtif du Hibou se bastonnant dans les couloirs d’un pénitencier nous laisse supposer que cette scène sera belle et bien présente. Profitons-en pour parler un petit peu du personnage du Hibou (The Nite Owl), alias Dan Dreiberg, joué par Patrick Wilson. A l’instar de Miss Jupiter, le Hibou semble avoir perdu son costume en toile légère marron au profit d’un costume de cuir noir tout droit sortie d’une planche du Dark Knight. Ca passe peut-être mieux à l’image, mais il n’empêche qu’on ne peut que regretter ce choix, puisque dès lors le Hibou passe pour un ersatz de Batman, ce qui n’est absolument pas fidèle. On remarque qu’il en fait même une sorte de surhomme, puisqu’un peu plus tard dans la bande-annonce, on le voit atterrir au milieu d’une foule. S’il s’agit là de la séquence de flash-back du chapitre 2 « Amis absents », c’est encore une fois une liberté, puisque dans cette scène, le Hibou se sert de son échelle pour sortir de son vaisseau.

Le vrai costume du Hibou

Tout de suite c'est moins classe

Puisqu’on parle de cette séquence de flash back de chapitre 2, un petit mot sur le Comédien (The Comedian) ou Edward Blake pour les intimes, joué par l’excellent Jeffrey Dean Morgan, bientôt à l’affiche d’Un mari de trop avec Uma Thurman et Colin Firth. Dans cette bande annonce, on peut voir que Snyder n’a pas repris le premier costume du comédien (avec son masque de catcheur mexicain) comme l’indique le plan où on le voit à bord du vaisseau du hibou. En revanche, il respecte fidèlement le plan de défenestration de celui-ci (chapitre 1, c’est une des premières scènes du comics) et la fameuse séquence du Viêt-Nam (Chapitre 4) où Manhattan et Blake crament sans sourciller un bon paquet de Viêt-Cong. Sur cette dernière, on aurait quand même aimé que Doc Manhattan soit vraiment plus grand...

On parle maintenant d’Adrian Veidt, aussi appelé Ozymandias, incarné par Matthew Goode. Peut-être le personnage le plus important de l’histoire, il se montre plutôt rare dans cette BA et ce n’est qu’au détour de deux coupes que nous avons la chance de le découvrir. Tout d’abord dans un plan provenant certainement de la toute fin du film (mais il faut le savoir !) et ensuite dans une séquence de baston situé dans le chapitre 5, lorsqu’Adrian se fait agresser dans le hall de son propre building. Si on se réjouit que le veston violet que porte Ozy dans cette scène ait été conservé, on remarque que c’est sur le costume de ce dernier que les différences sont les plus flagrantes à l’image. Fini le look Egyptien avec le gros about-jour un or autour du coup et le cerceau autour de la tête, place au costume moule burne en skaï qui fait encore pensé à Batman... période Schumacher cette fois !

On termine enfin avec le personnage le plus charismatique des Watchmen, Rorschach (ou Walter Kovacs), qui sera interprété par Jackie Earl Haley. Bonne nouvelle : le masque de ce dernier changera bien d’apparence comme c’est le cas dans la BD. Les rares moments qui sont tirés de la séquence du chapitre 5, qui intervient dans le comics alors que Rorschach est pris au piège dans l'appartement de Jacobi pour un meurtre qu'il n'a pas commis.

Restent ensuite quelques plans ça et là, montrant pêle-mêle le combat du comédien avant son assassinat, l’enterrement de ce dernier (Chapitre 2 pour les deux), et enfin et surtout, le plan final de ce trailer qui dévoile la forteresse de Docteur Manhattan sur Mars (chapitre 9).

Tout ça pour dire qu’à part quelques détails près (les costumes en particulier), Zack Snyder a parfaitement retranscrit l’univers des Watchmen. Sa seule audace est finalement d’avoir totalement zappé l’aspect années 80 du dessin de Dave Gibbons, basé sur l’utilisation des couleurs comme des filtres devant une caméra. Un choix qui fait effectivement que l'aspect global du film s'éloigne grandement du comics d'un point de vue pûrement chromatique, mais qui rend l’ensemble beaucoup plus sombre et moderne, peut-être plus adapté aux exigences du public d'aujourd'hui. C’est ce genre de décision qui sépare un Snyder d’un Rodriguez, c’est ce parti pris qui fait la différence entre un vrai film de cinéma et une simple photocopie animée de comics. Vivement le 18 Mars 2009 !